Limitation du flux aérien : colère et déception des professionnels @CorseMatin

Selon un décret paru hier, les déplacements aériens sont interdits jusqu’au 23 juin entre le continent et la Corse et vice versa, sauf pour « un motif impérieux ». XAVIER GRIMALDI
Le décret paru hier au Journal officiel qui précise que d’ici le 23 juin le transport aérien entre le continent et la Corse resterait soumis à des motifs impérieux, révolte une bonne partie des socioprofessionnels. Ils espéraient commencer la saison au plus vite
Les professionnels qui, en milieu de semaine dernière, se réjouissaient de l’annonce d’Édouard Philippe mettant fin à la règle des déplacements limités à 100 km, sans mentionner la Corse, ont déchanté hier matin en découvrant le décret gouvernemental 2020-663 paru le jour même au Journal officiel.
Dans son article 10, le décret précise que les déplacements aériens sont interdits jusqu’au 23 juin entre le continent et les territoires d’Outre Mer ainsi qu’entre le continent et… la Corse, « sauf lorsqu’ils sont fondés sur un motif impérieux d’ordre personnel ou familial, un motif de santé relevant de l’urgence ou un motif professionnel ne pouvant être différé ».
Alors qu’ils espéraient pouvoir démarrer le 2 juin, une saison déjà fortement compromise, ils devront donc patienter encore trois semaines pour un retour à la normale de la desserte aérienne assurée par Air Corsica et les low cost. « Nous étions soulagés car l’idée du green pass avait été quelque peu écartée la semaine dernière par l’Exécutif de Corse, et maintenant, nous avons ça… », se désole Toussaint Coeroli, le président des Gîtes de Corse. Pour rappel, vendredi dernier, à l’assemblée de Corse, Gilles Simeoni semblait nuancer la proposition de green pass à proprement parler, en suggérant un débat sur la sécurisation des flux pour permettre la réussite de la saison.
Les Gites de Corse, comme d’autres fédérations de socioprofessionnels (l’Umih Corsica, la Fédération de l’hôtellerie de plein air, CPME, Strada Corsa, U2P,Medef), se sont associés au communiqué publié hier par la Chambre régionale de commerce.
Tous font part de leur consternation face à l’exclusion de la Corse des régions métropolitaines. Et considèrent comme incohérentes ces mesures restrictives qui concernent seulement l’aérien et non le maritime (lire p. 5).
« Cela n’a pas de sens, tonne-ton à la CCI. Vous pouvez voyager en avion de Paris à Bordeaux, mais pas de Paris à Ajaccio. En revanche, il est encore possible de prendre le bateau… » Dans un tweet publié hier, Jean-Charles Orsucci, le maire de Bonifacio qui milite depuis plusieurs semaines pour une réouverture de la Corse, s’interroge de la même façon sur la pertinence du décret.
« Cette mesure risque de nous fragiliser encore plus »
De son côté, le Medef fait part de ses inquiétudes quant aux conséquences de la limitation du trafic aérien : « Nous aurions préféré que tout soit simplifié au 2 juin, cette mesure risque de fragiliser les possibilités de réservations en Corse puisqu’elles ont en revanche repris sur le continent. Le risque de propagation de l’épidémie semble aujourd’hui bien s’éloigner, il est urgent de prendre maintenant les bonnes décisions », estime son président, Charles Zuccarelli.
« Le fait de placer la Corse aux côtés des territoires mentionnés à l’article 72-3 de la Constitution, c’est un peu la réponse du berger à la bergère », souffle un acteur du tourisme qui rappelle les demandes de l’Exécutif de Corse pour la mise en œuvre de son propre plan de déconfinement, voté le 7 mai dernier dans l’hémicycle territorial (à savoir une sortie par paliers, avec un retour progressif et sécurisé des flux).
Le président de la Fédération corse de l’hôtellerie plein air, Alain Venturi, pointe du doigt lui aussi les positions de la Collectivité territoriale : « La CdC a compétence en matière de transport. La date du 23 juin pour un retour des flux était fixée dans son plan mais le président de l’Exécutif nous avait indiqué à l’occasion d’une réunion tenue à la CCI le 11 mai que ce calendrier serait revu, nous sommes déçus ».
Mais Gilles Simeoni dissocie totalement son action du décret paru hier : « Notre inquiétude a toujours été de sécuriser les flux pour réussir la saison touristique. Il n’a jamais été question pour nous d’interdire la venue des touristes en Corse pour la période du 2 au 23 juin ! ». Hier, le conseil exécutif a réclamé la levée de cette interdiction (lire p. 5).
« Des centaines d’annulations de réservations »
Réclamant une modification rapide du décret et la reprise normale du trafic à destination de la Corse, les représentants du secteur touristique soulignent les conséquences désastreuses de cette mesure : « Pour les touristes, nous sommes ainsi dans une zone grise entre le 2 et le 23 juin, explique Alain Venturi. Les gens nous appellent, nous expliquent que leurs vols ont été annulés, et sont désemparés. Il y a un flou dans la communication qui nous est préjudiciable. Nous ne pouvons que difficilement répondre à nos clients. Nous avons déjà perdu toute l’avant saison, et nous allons perdre en prime le mois de juin. Tout cela crée beaucoup d’inquiétudes. J’espère au moins que nous arriverons à sauver juillet et août ! »
Les Gîtes de Corse enregistrent également depuis plusieurs jours un nombre important d’annulations qui concernent le mois de juin et impactent également début juillet :
« Les gens n’attendent pas fin juin pour se décider, détaille Toussaint Coeroli. Ils viennent en famille, ils doivent s’organiser, acheter les billets. Nous déplorons entre le mois de juin et début juillet environ 600 annulations. Et pour le reste de juillet, les clients commencent à s’interroger. Nous leur remboursons bien sûr leurs séjours. Pour l’instant, nous tablons sur une baisse du volume d’affaires entre 50 et 60 %, sans compter la perte du mois de juin. »

« Nous avons fait notre deuil des 15 premiers jours de juin »

Pour Jean-Noël Marcellesi, le président du Cercle des Grandes Maisons Corses : « Rien n’interdit de penser, en fonction des retours d’expériences, que ces mesures puissent être assouplies plus tôt que prévu ». DOC CM
Êtes vous surpris du décret du gouvernement paru hier qui limite jusqu’au 23 juin les déplacements aériens vers la Corse à des motifs impérieux et prévoit, passé cette date, un déblocage complet ?
De prime abord, toute disposition restrictive génère de la déception. Mais soyons clairs : les réservations que nous avions enregistrées il y a plusieurs mois pour la première quinzaine de juin ont totalement fondu lors de la période de confinement. Et nous sommes nombreux à avoir fait notre deuil de cette première quinzaine. J’observe à cet égard, que le programme de desserte d’Air Corsica au départ et à destination de Paris sur cette période est réduit à sa plus simple expression. Parallèlement, chaque jour qui passe, semble confirmer une décrue de plus en plus marquée de l’épidémie et dans vos colonnes il y a quelques jours à peine, le professeur Philippe Parola, s’il n’excluait pas l’hypothèse d’un caractère saisonnier de l’épidémie du Covid-19, écartait toute perspective de rebond à court terme.
Si ce sas de décompression de trois semaines à partir d’aujourd’hui, devait être garant d’un déconfinement pleinement réussi, qui permette d’engager au-delà du 23 juin dans des conditions sécurisées le démarrage de la saison, il serait de notre devoir de consentir dans un esprit responsable à ce sacrifice. J’ajoute, qu’en fonction des retours d’expérience rien n’interdit de penser que ces mesures puissent être assouplies plus tôt que prévu. Enfin, le délai qui nous sépare du 23 juin pourrait être utilement mis à profit pour assurer le déploiement logistique des mesures sanitaires qui seront annoncées dans les prochains jours.
Par conséquent, la réouverture sans restriction au 23 juin vous
satisfait-elle ?
Bien sûr, puisque nous l’avions demandée expressément dans notre lettre ouverte que nous avions fait paraître il y a quelques jours dans vos colonnes.
Le gouvernement devrait annoncer cette semaine des mesures sanitaires spécifiques aux déplacements vers la Corse. Vous vous êtes positionnés clairement contre le green pass, qu’espérez-vous des prochaines mesures ?
S’il est clair que le green pass n’a pas convaincu et que la situation sanitaire s’est singulièrement améliorée depuis qu’il a été proposé, nous avons néanmoins indiqué qu’un dispositif fiable, consensuel et respectueux des libertés individuelles demeurait souhaitable. Mais nous ne pouvons évidemment préjuger des décisions ou des propositions que le gouvernement communiquera ces jours-ci.
Comment envisagez-vous la saison ?
Je ne trahirai pas de secret en vous disant que la saison sera de toute évidence mauvaise, même si, depuis les annonces successives relatives au déconfinement, les réservations sont reparties à la hausse dans la plupart des établissements. Et la médiatisation du déblocage complet de la desserte à partir du 23 juin devrait logiquement stimuler les réservations en donnant à nos clients une parfaite visibilité sur la suite de l’été. En revanche, il serait souhaitable que, dans un esprit de réciprocité, la déclinaison territoriale des mesures de sauvegarde du tourisme arrêtées par le gouvernement, tienne compte de l’effort supplémentaire consenti au mois de juin.
Car la Corse sera le seul territoire de métropole à se voir imposer cette contrainte.
C.M.

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