Roland Dominici, hôtelier et président de la coordination des industries touristiques de la Corse. Archives CM |
Le président de la coordination des industries touristiques de la Corse et responsable d’une structure hôtelière à Porto-Vecchio, Roland Dominici, s’inquiète du sort des saisonniers, maillon essentiel des entreprises touristiques, si aucune solution n’est proposée pour garantir leur emploi.
L’après-coup sanitaire sera économique, l’île dont 30 % du PIB repose sur le tourisme va être touchée de plein fouet. Quelles sont vos inquiétudes ?
Tous sont d’accord pour préconiser telle ou telle mesure pour sauver les entreprises du secteur et, aussi bien l’État que la CdC, commencent à répondre en proposant des solutions provisoires. Mais je n’ai pas encore lu ou entendu quiconque parler de la problématique des saisonniers résidents. En effet, si sauver les entreprises est un impératif que je partage, je pense que l’on a totalement oublié ceux qui nous permettent chaque année d’assurer le bon fonctionnement de nos entreprises : les saisonniers.
Quel constat dressez-vous pour cette population saisonnière ?
La question est de savoir ce qu’il va se passer pour eux. Si l’activité reprend à un moment donné, quelle sera la réaction des chefs d’entreprise qui ne sauront pas évaluer l’effectif dont ils auront besoin pour faire face à la reprise ? Je suis un chef d’entreprise responsable qui se soucie du devenir de son personnel. Sans les saisonniers, mon entreprise ne vaut rien. Je ne vois que deux solutions : soit jouer la prudence et embaucher un minimum dans l’attente d’avoir une vision de la reprise d’activité, soit embaucher normalement en respectant les promesses d’embauche sans avoir l’assurance que l’activité permettra d’assurer du travail pour tous.
Cela va être un véritable casse-tête dans un contexte d’incertitude quant au déroulement de la saison…
Oui, dans le premier cas, il faudra donc tirer au sort pour savoir qui seront les élus avec un contrat de travail et quels seront ceux qui resteront au bord du chemin avec une situation très difficile à gérer. Dans le deuxième cas, c’est l’entreprise qui prend le risque de se retrouver avec un excédent de charges par rapport au chiffre d’affaires généré par l’activité. Il est urgent d’apporter des réponses aussi bien aux saisonniers qu’aux entreprises.
En tant que professionnel du tourisme, avez-vous des pistes à proposer ?
Je souhaiterais proposer au président de l’Exécutif pour la région et au préfet pour l’État une solution compensatoire qui permettrait de ne pas se retrouver avec une casse sociale de grande ampleur. Il faut interpeller tout le monde et essayer de trouver un dispositif dérogatoire pour la Corse. Cette mesure consisterait à ce que les entreprises puissent embaucher tous leurs saisonniers (en souhaitant une bonne reprise d’activité). Elles paieraient l’intégralité du salaire, mais seules les heures réellement effectuées resteraient à la charge de l’entreprise, les heures non travaillées seraient compensées à l’entreprise par Pôle emploi, voire d’autres fonds mobilisés pour sauver l’emploi. Ce qui reviendrait à un dispositif analogue au chômage partiel.
PROPOS RECUEILLIS PAR NADIA AMAR