Les professionnels du tourisme saluent, pour la plupart, les annonces faites par Édouard Philippe hier. PIERRE-ANTOINE FOURNIL |
Bernard Giudicelli, président régional de l’Umih (Union des métiers et des industries de l’hôtellerie) :
« Il y avait deux messages à faire passer. Le premier, à l’attention des Français et afin de rassurer les professionnels, pour dire que l’on pourrait repartir en vacances cet été. Et à la clé, si tout va bien, pour expliquer que les cafés et restaurants devraient rouvrir probablement début juin ou mi-juin. Sinon, aucune mesure d’urgence, de sauvegarde, à proprement parler. Pas un seul mot sur nos spécificités alors que nous nous battons depuis le début de la crise pour les faire valoir. Il est trop tôt pour une analyse. Prévaut un sentiment de déception. Quant au 1,3 milliard d’euros, cela peut sembler beaucoup, mais sachant qu’en France 7 à 8 % du PIB est lié au tourisme, finalement ce n’est pas si énorme. On a débloqué 1 000 milliards pour la relance au niveau européen. »
Jean-Baptiste Pieri, hôtelier, ancien président du Synhorcat (Syndicat national des hôteliers restaurateurs cafetiers traiteurs) pour la Corse :
« Pas de surprise particulière. Il y a une grosse communication, ça ne mange pas de pain, sur l’incitation à l’adresse des Français à réserver leurs vacances. Néanmoins, dans les annonces, et ce sera peut-être explicité plus tard par le préfet ou le secrétaire d’État au tourisme, pas de précisions sur la situation de la Corse. Au-delà, je reprends les mots de Didier Chenet, président du GNI (groupement national des indépendants, ex-Synhorcat), pour rappeler qu’il y a une grosse part de dettes dans les volumes mobilisés et qui dit dettes dit remboursement. Quand, comment et à quel prix ? Nous avons les exonérations souhaitées. Mais elles sont sans mesure avec le cataclysme que vit le secteur, en particulier en Corse où la crise est amplifiée par l’insularité, la dépendance aux transports et parce que dans notre économie, le tourisme est prépondérant, pourtant, sur ce fait spécifique, je n’ai pas entendu de réponse. Or, aujourd’hui, la dépense touristique dans l’île, ce sont 3 milliards redistribués à 90 % dans le reste du circuit économique insulaire. On parle de recul de réservations en Corse de l’ordre de 60 à 65 % contre 35 % en France métropolitaine. »
César Filippi, à l’initiative de la toute récente Fidirazioni di l’uparaghji di u turismu corsu :
« C’est un plan conséquent même si quelques inconnues demeurent. Nous avions demandé, au titre de la fédération, que les tribunaux de commerce allongent les délais de redressement pour sauver les petites entreprises, c’est fait. Un pas important a été franchi vers la réouverture des cafés, hôtels, restaurants. La saisonnalité est prise en compte puisque l’on va regrouper les trois mois les plus forts, mais nous n’avons pas encore de vue sur les contraintes en termes d’exploitations de nos établissements, il s’agit pourtant d’un critère fondamental. Un exemple, dans mes trois restaurants sur lesquels je fonde mon chiffre d’affaires, je peux recevoir 450 personnes, vous imaginez si on pose une limite à 50 personnes… »
Jean-Noël Marcellesi, président du Cercle des Grandes Maisons corses :
« Deux éléments importants, d’abord, il va y avoir une enveloppe renforcée sur les prêts BPI à destination de la Corse et des Outre-mer. Ensuite, une sorte de clause de revoyure, qui me paraît majeure, est mentionnée. Elle prévoit un bilan d’étape en juillet 2020 et un rendez-vous à l’horizon d’octobre pour évaluer l’efficacité des dispositifs, les éventuels trous dans la raquette, avec la possibilité de se concerter en vue d’ajustements, tout cela va dans le bon sens. La mesure réelle de l’ampleur de la crise a été prise. L’importance du tourisme dans le PIB national présenté comme un fleuron de l’économie était pour nous une évidence, c’est désormais reconnu, et c’est rassurant. Par ailleurs, calculer les PGE (prêt garanti par l’État) non plus sur trois mois d’activité en divisant simplement le chiffre d’affaires annuel par quatre, mais en prenant les trois meilleurs mois d’activité, pour une région qui vit d’un tourisme à très forte saisonnalité comme la Corse, change complètement les données du problème. C’est une vision bien plus exacte des difficultés qui sont les nôtres. On note aussi l’implication de Bpifrance, de la Banque des territoires et de la Caisse des dépôts, cela faisait partie des attentes corses. On ne peut que se réjouir de l’ampleur inédite du dispositif qui va être déployé. »
Alain Venturi, président de la Fédération corse de l’hôtellerie de plein air :
« Je ne peux que saluer l’ensemble des dispositifs financiers d’accompagnement annoncés. Certains devront être adaptés à la Corse, mais cela fait partie du travail à accomplir avec le secrétaire d’État au tourisme, d’ici la fin mai. Je suis un peu plus déçu en ce qui concerne la date des départs en vacances, uniquement à partir du mois de juillet, mais là encore, cela demande à être précisé. L’impression générale demeure cependant positive. Cela nous permet de reprendre des réservations pour la haute saison, ce qui va avoir un effet de dynamique indéniable. Il faut désormais plancher avec la CdC pour débloquer les moyens de transport. »
Toussaint Coeroli, président des Gîtes de France Corse :
« Nous nous félicitons de ce plan. Avec un petit bémol, si le gouvernement a pris la mesure du poids du tourisme dans l’économie, il est encore plus essentiel pour la Corse en recherchant le juste équilibre entre l’économique et le sanitaire. Le plan est d’envergure, un engagement de 18 milliards, encore faut-il le décliner de manière plus détaillée. Certaines mesures comme la prolongation du chômage partiel auraient pu être poussées plus avant. Nous, gîtes, avons seize salariés à l’année. Avec l’absence totale d’avant-saison et une haute saison réduite, le maintien du dispositif quelques mois de plus nous aurait aidés. La possibilité de départ en vacances dès juillet est une bonne nouvelle, en espérant que les règles sanitaires en direction des transports seront rapidement établies pour pouvoir enregistrer des réservations. Le remboursement des clients en cas d’aggravation de la situation est également légitime, nous, professionnels corses, l’avions aussi formulé. Enfin, la réouverture des restaurants ne ciblera que les résidents insulaires, si les déplacements dans un rayon de 100 kilomètres sont encore en vigueur en juillet. »