Alors que le Premier ministre s’exprimera à 16 heures, aujourd’hui, pour dévoiler les modalités de la deuxième phase de déconfinement, le président de l’Exécutif corse, Gilles Simeoni, interpelle le gouvernement.
L’île attend toujours une réponse à la proposition d’un principe de Green pass contenue dans la délibération de l’Assemblée de Corse votée le 7 mai dernier. L’idée, tenter de sauver la saison estivale, même réduite à une portion congrue, tout en garantissant la sécurité sanitaire de la Corse pendant cette période. Reste que depuis le 7 mai, seul l’Intérieur, via la voix de Christophe Castaner, a laissé entendre que, si le Green pass n’était pas forcément la solution, des pistes étaient, néanmoins, à l’étude, eu égard à la « spécificité » de la Corse. La concertation semble avoir fait long feu.
Dégâts irréversibles
La concertation, en revanche, veut conjurer le président Simeoni, a eu lieu en Corse, « entre le Conseil exécutif et les acteurs du secteur économique et touristique, dont la chambre de commerce et d’industrie régionale de Corse ». Constat conjoint, à la clé. Avec, d’abord, l’impérieux besoin de « sauver ce qui peut l’être de la saison touristique, d’ores et déjà altérée par des dégâts irréversibles » l’avant-saison ayant été réduite « à néant (perte estimée à 1 milliard d’€ de recettes) ». Avec, ensuite, la conscience qu’en Corse, « c’est tout le tissu économique et social de l’île qui est menacé, dès cet été et a fortiori à compter de la rentrée de septembre, en cas d’échec de la saison touristique ». Sauver cette dernière passe par descritères tels que la « sécurisation sanitaire des flux de population liés à la période estivale », le « renforcement et compétitivité de l’offre de transport, notamment en ce qui concerne les compagnies délégataires de service public, »l’attractivité et la compétitivité de l’offre touristique« , »la lutte contre la concurrence déloyale faite aux professionnels du secteur« et »l’adoption de mesures d’urgence pour compenser les préjudices déjà subis« .
En attendant, le sablier s’écoule, concassant la marge de manœuvre.
Quelle conduite tenir, en effet, tandis que les compagnies frappent aux tarmacs des aéroports de l’île et que le scepticisme des professionnels cède la place à la colère ?Quid de l’été, quand les autres destinations en Méditerranée, les îles proches, voisines, amies, sont, elles, déjà au taquet du rebond, mais cette fois, touristique ?
La priorité est devenue urgence, Gilles Simeoni le sait qui enjoint, exhorte, tout au moins presse le gouvernement d’éclairer un choix. »Le gouvernement doit annoncer le jeudi 28 mai ce que seront les nouvelles mesures prises au titre du déconfinement (…). Les différentes décisions annoncées en cette occasion doivent donner à l’ensemble des acteurs de notre île la lisibilité indispensable à la mise en œuvre d’une stratégie sanitaire, commerciale et touristique pour les trois mois à venir. Il est souhaitable, eu égard aux contraintes de calendrier, que le gouvernement réponde aussi en cette occasion à la proposition du principe d’un Green Pass.«
Le Conseil exécutif de Corse demande donc clairement à Matignon de faire connaître sa position. Il n’en est que deux envisageables. Soit la »proposition mérite d’être travaillée et approfondie, avec l’ensemble des acteurs, y compris pour la faire évoluer et ainsi définir, entre toutes les parties prenantes, une mise en œuvre opérationnelle rapide et satisfaisante au plan de la sécurité sanitaire comme sur celui de l’at- tractivité touristique. Soit le gouvernement décide de l’écarter, et il lui appartient alors de préciser par quels moyens la sécurisation sanitaire de la Corse en période estivale sera assurée, en garantissant que les dispositifs envisagés sont de nature à éviter toute saturation des structures hospitalières de l’île et tout rebond épidémique« .
Dead line en vue
Quoi qu’il en soit, persuade le président de l’Exécutif, il faudra être fixé dès la première semaine du mois de juin. Date à laquelle, et après large consultation, l’ensemble des protocoles sanitaires dans chaque secteur concerné aura été défini. Les plans de réouverture des lignes maritimes et aériennes, y compris dans le cadre du service public, actés. Le cadre d’encouragement aux pratiques vertueuses et de lutte contre le para-commercialisme, donné. Le calendrier resserré de discussions des mesures d’urgence, mais aussi de court et moyen terme, pour le volet territorial du plan de soutien, de relance et de transformation du tourisme insulaire, établi.
Le temps presse, oui. À tous niveaux. Politique aussi.
ANNE-C. CHABANON