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Baromètre Ancoris : « Le tourisme est le seul secteur où les projets d’investissements sont à la hausse »

@Lechotouristique

Le tourisme hexagonal enregistre une hausse de 15% des projets d’investissements au premier semestre. Une bonne dynamique qui s’accompagne de mutations significatives.

Pour la première fois, la demande « camping traditionnel » décline au profit des écodomaines et des projets d’hébergements insolites. ©Adobe Stock 

Durement touché par la crise sanitaire, il revient de loin et pourtant : le tourisme hexagonal aiguise plus que jamais les appétits des investisseurs. Quand les autres secteurs marquent le pas, il enregistre au premier semestre une hausse de 15% des projets d’implantation des entreprises. « C’est le seul secteur où les projets d’investissements sont à la hausse », relève Guillaume Gady, le directeur général d’Ancoris, spécialiste de la détection et du développement de projets d’implantation d’entreprises en France.

Sur fond d’inflation et d’incertitudes géopolitiques, la crise de confiance qui frappe les autres secteurs, avec des projets d’implantations d’entreprises en chute de 16%, épargne donc le tourisme. Une dynamique que le secteur doit notamment à ses belles performances depuis la sortie de la crise sanitaire, comme en témoigne encore cette année la saison estivale. Le contexte incertain, les difficultés d’obtention des prêts bancaires et autres évolutions de législation – on se souvient notamment de la nouvelle réglementation pour les HLL – n’auront donc pas découragé les investisseurs. Au premier semestre 2023, 113 projets ont été détectés, contre 98 sur la même période l’an dernier. « Je ne lis pas dans une boule de cristal, mais les signaux nous poussent à croire que ça va continuer », indique Guillaume Gady.

C’est la troisième année consécutive que le nombre de projets est à la hausse. Pour autant, il serait faux de dire que les années se suivent et se ressemblent. Premier constat : certaines tendances encore émergentes il y a quelques années s’inscrivent désormais dans le marché de manière structurée. « C’est le cas pour les projets liés à la déconnexion, à la ruralité, aux grands espaces et tout ce qui relève des hébergements insolites, détaille Guillaume Gady. Nous ne sommes plus dans quelque chose qui relève de l’anecdotique. »

Le camping recule par rapport à l’hébergement insolite

« Le secteur de l’hôtellerie de plein-air semble amorcer une réelle transmutation de son modèle et de son offre, analyse Ancoris. Après un boom des demandes pour le secteur de l’hôtellerie de plein-air en 2022, celles-ci sont en perte de vitesse sur le 1er semestre 2023 (-2 points par rapport au résultat observé sur l’ensemble de l’année 2022). Ce domaine reste plébiscité par les investisseurs touristiques souhaitant développer des projets au vert, respectueux de l’environnement pour des clientèles adeptes de grands espaces. Cependant, ce premier semestre est marqué par un changement majeur et le déclin de la demande  de « camping traditionnel » au profit des écodomaines et des projets d’hébergements insolites », détaille encore Ancoris. Une première.

30% des demandes concernent l’hôtellerie, soit 7 points de plus qu’au 1er semestre 2022, un chiffre qui reste toutefois égal au taux observé en 2021. 

19 projets de loisirs ont été identifiés au premier semestre 2023, soit 11% des projets détectés sur la même période. Les projets de restauration s’affichent en hausse de 50%.

Des investissements de plus en plus importants

« Le marqueur de l’année 2022 et qui se poursuit en 2023 reste l’émergence de projets portant un investissement total très conséquent », souligne par ailleurs Ancoris. Au 1er semestre de cette année, 37% des projets ont un investissement global envisagé de plus de 3 millions d’euros et 13% de plus de 10 millions d’euros. 

Longtemps restés l’apanage de grands comptes emblématiques du secteur, ces projets structurants pour les territoires sont également portés par les PME émergentes qui s’emparent de nouvelles méthodes de financement (adossement à des fonds d’investissement, crowdfunding, levée de fonds, etc.), remarque également Ancoris. 

« Les prises en compte par les porteurs de projets des enjeux de durabilité, de protection de l’environnement sont de plus en plus fortes aussi, remarque Guillaume Gady. Sur le premier semestre 2023, un quart des projets démontrent que les enjeux RSE sont pris en compte (…).  Il y a encore deux ans, cela représentait à peine 4% des projets. D’une manière générale, les projets touristiques deviennent de plus en plus complexes et techniques, en raison notamment de ces questions. Une complexité qui s’explique aussi par des concepts de plus en plus hybrides, associant plusieurs strates d’activité au sein d’un même projet : restauration, hébergement et éventuellement loisirs. » Ce qui a aussi un prix. Et le foncier pèse de plus en plus dans le budget. 

Un sujet central. 25% des projets touristiques recherchent principalement du foncier pour développer de nouveaux concepts, notamment en hôtellerie (47,5%) et en hôtellerie de plein air (42,5%). Un chiffre en hausse de 10 points, entre le 1er semestre 2022 et le 1er semestre 2023. 

Or le foncier est devenu une denrée rare. “Et ce qui est rare est cher”, résume Guillaume Gady. « Face aux difficultés liées à son identification sur certains territoires, aux problématiques de PLU ou encore à la loi ZAN, ce besoin apparaît comme un élément essentiel à intégrer à la stratégie d’attractivité de projets d’implantation touristique », analyse Ancoris. 

« Devenir un département attractif ne dépend plus du patrimoine culturel »

« Aujourd’hui, ce que l’on voit, c’est que ceux qui s’en sortent le mieux, ce sont les territoires qui arrivent à mettre en place de l’ingénierie pour capter ces projets. C’est la loi du marché, l’offre et la demande, explique Guillaume Gady. Si vous vous trouvez face à un investisseur touristique et que vous ne pouvez pas répondre à son besoin, il ira implanter son projet ailleurs. »

« Il faut bien percevoir que l’économie a changé, le visage des territoires a changé, poursuit-il. La demande évolue, même sur des territoires qui sont attractifs au niveau touristique. À une époque, les châteaux de la Loire attiraient le plus de visiteurs dans leur région, maintenant, c’est le Zooparc de Beauval. Ce n’est pas neutre. On voit bien qu’il y a un shift. Ce n’est pas seulement un glissement d’une offre patrimoniale vers du divertissement. Le vrai changement, c’est que le Zoo Parc de Beauval aurait pu être implanté n’importe où. Ce qui signifie qu’il n’y a pas besoin de disposer de biens culturels immenses pour devenir un territoire attractif touristiquement parlant. C’est là où le tourisme devient très important en matière d’aménagement des territoires. Cela peut permettre un rééquilibrage dans des territoires plus reculés, en ramenant de l’activité, de l’emploi, sans pour autant venir défigurer le paysage. »

« Il faut réinjecter de la nuance »

La question de l’acceptabilité des projets peut en effet se poser. « Il y a des projets qui sautent parce que les gens ont le droit aussi de décider de ce qu’ils veulent chez eux. Vous habitez dans un territoire, vous avez envie d’avoir voix au chapitre et c’est normal. Mais il y a aussi une dimension pédagogique qui n’est peut-être pas suffisamment prise en compte », juge-t-il. Des questions qui se posent en effet avec de plus en plus d’insistance. « Dans ces débats-là, il faut réinjecter de la nuance, pense Guillaume Gady. Certaines politiques sont viables pour certains territoires et pas sur d’autres. Mais développer un territoire d’un point de vue touristique permet de continuer à répondre au contrat social qu’on a avec la population. Ce contrat social, à un moment, a été rompu avec la désindustrialisation de notre pays. Nous sommes donc obligés de transformer notre économie. Le tourisme est une des solutions », conclut Guillaume Gady.

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